Pour fêter le grand retour de Pierre sur la Valise en carton (depuis quelques jours, la page d’accueil était entièrement rouge d’articles d’Elise), un bel article serpent de mer, qui traîne depuis plusieurs mois sur mon ordinateur. Avec un peu de différé, voici donc quelques informations sur la semaine culturelle au Togo, telle qu’elle s’est déroulée fin mars à Kpalimé.
Donc, le Togo, depuis quelques années, demande aux écoles d’organiser une semaine culturelle nationale. L’idée, ou ce qu’on croit en comprendre d’après le discours d’ouverture des huiles invitées, est de donner une place à la culture togolaise, parce que la culture, eh bien, c’est important — et puis on n’est fort qu’en connaissant bien sa culture, et il ne faut pas l’oublier.
L’intention est louable. Dans les faits, la semaine culturelle est un prétexte à toutes sortes de manifestations, le plus souvent organisées par les élèves.
Il y a les sketchs écrits par les élèves du groupe prévention-machin-chose : l’adolescente qui réussit bien à l’école, mais que ses copines de mauvaise vie entraînent loin du CEG. Petits enfants, méfiez-vous du suivisme.
Il y a la chanson. Un jeune élève, que je voyais réviser nerveusement son texte depuis quelques temps, s’avance ; pour l’occasion, il a mis son plus beau nœud papillon rouge, qui jure à merveille avec son pantalon de velours vert pomme. Il salue, puis empoigne le micro façon rappeur, fléchit les jambes, et déclame puissamment un texte rythmé dont le leitmotiv principal est « stop SIDA ! » — avec quelques ajouts pour expliquer que le SIDA, c’est vraiment nul et qu’on n’en veut pas.
Il y a le discours du coordinateur en chef de PSI (vous savez, la grande association internationale qui vient faire de la prévention suivie et très organisée pendant un an dans les collèges). On le présente, il s’avance en souriant, et lance : « Hallelujah ! Hallelujah ! Praise the Lord ! » Thème de son discours : aujourd’hui, le sess (eh non, l’accent ne tolère pas les « x »), le sess, donc, est dévoyé : du beau jardin d’Eden biblique, Genèse 3. 12, on est passé à un monde qui fait n’importe quoi avec le sess, comme au temps des idoles, Rois 7. 18, et ça ne plaît pas à Dieu. Il y en a même pour qui ce n’est plus qu’une affaire de plaisir. Il faut donc redonner sa place au sess, et parler de sessualité à nos enfants. Oh, et s’il y a des musulmans dans la salle, vous savez, c’est aussi dans le Coran, Sourate 5 verset 9. Hallelujah ! Praise the Lord ! Merci1.
Il y a le spectacle du club allemand, organisé par Mortimer. Initialement prévu à 7h30, il a été déclaré en retard d’une heure, puis de deux. Nous avons dû nous éclipser pour une réunion de LIRE à Kpodzi — et le temps que nous revenions, le spectacle était déjà terminé. Nous n’en n’aurons donc rien vu.
Il y a la chorale de Kpodzi, qui a égayé les cérémonies d’ouvertures et divers moments forts de la semaine culturelle à Kpodzi. Les élèves chantent, à deux ou quatre voix, c’est très joli — et surtout étonnamment juste, une merveille par rapport aux notes approximatives des fanfares ou de l’hymne national du matin. Nous n’avons pas réussi à savoir où le directeur de la chorale a appris la musique, mais décidément, il est doué.
Il y a le concours de lecture, organisé par LIRE et greffé sur le programme d’ouverture de la semaine culturelle. Avec en guest star, la directrice de Radio Peace FM et le roi de Kpalimé ! (Il parait que les chefs coutumiers sont encore nommés, et jouent un certain rôle ; lui était représentant d’une association de développement ayant sponsorisé les prix du concours de lecture). A l’annonce du gagnant du concours, grande remise de prix sous forme de livres — puis le proviseur vient faire le malin, et proclame fièrement qu’il ajoute 2 000 F CFA de sa poche (en fait de la caisse du collège). M. Kloutsevi, qui ne veut pas être en reste, proclame sa participation au prix en exhibant un billet de 1 000 F CFA. Bref, c’est la grande pompe pour la remise des prix aux gagnants (et des prix de consolation aux participants, personne ne repart les mains vides), mais les élèves ont l’air contents.
Enfin, il y a le récital, le soir, à Kpodzi. « 18h : Récital », avons-nous lu sur le programme. Bon, allons voir. Nous arrivons vers 20 heures : le spectacle n’a pas encore commencé, et pauvres fous arrivés à l’heure trouvent qu’il y a de l’abus. Finalement, on commence — et nous comprenons que par « récital », il faut comprendre « élèves qui se succèdent pour danser et chanter en play-back sur des chansons connues ». Cela dit, c’est plutôt amusant, et certains groupes sont assez doués. À l’annonce d’un « groupe Tonnou », nous sourions : Tonnou est la plus assidue à nos groupes d’expression orale et écrite — et la plus assidue à plein de trucs en général, d’ailleurs : une hyperactivité qui amuse beaucoup Elise (que ceux qui ont des oreilles entendent).
Dans tout cela, de culture togolaise, peu. Les objectifs de la semaine culturelle sont un peu évincés par la culture populaire. Mais les élèves participent vraiment, et c’est l’occasion pour eux de monter plein de projets et de spectacles divers, ce qui est plutôt chouette.
1 : Les références bibliques sont approximatives : je n’ai plus les citations exactes en tête. Mais c’était l’idée.
Tags: culture
Commandez « Dans la malle », le livre du blog.
mai 18th, 2009 at 11:48
Ah ah… le grand retour de Pierre, après cette dure et longue période, ces terribles souffrances de rhume des doigts !
iron inside
mai 20th, 2009 at 22:58
Très intéressant ! Miaou