J’avais pris l’habitude de poser mon vélo contre un grand arbre, à proximité de la salle des professeurs, en arrivant à Zomayi le matin. Mais le lendemain de ma « prise de fonction », plusieurs personnes creusaient et piochaient au pied de l’arbre — j’ai dû mettre mon vélo ailleurs.
Lorsque je suis repassé, à la fin de la matinée, l’arbre gisait, déraciné, scié et étêté. Devant mon regard surpris, un professeur m’informe : « On est en train de construire une bibliothèque ». Ah, fort bien, comme à Kpodzi, donc : Zomayi aura aussi droit à sa bibliothèque. En quittant l’établissement, je songe qu’avant de quitter le Togo, fin mai, j’aurai peut-être le temps de voir le bâtiment achevé. Au rythme où va la construction, ici…
Les préjugés, c’est comme les boutons d’acné : quand on croit en avoir fini avec, on en trouve un juste sous son nez1. Le lendemain matin, plus un arbre de la zone n’était debout, et des palettes de parpaings s’élevaient à côté de l’aire de la future construction ; trois ouvriers creusaient déjà les tranchées des fondations. Déraciner un arbre, sous ce soleil, c’est du boulot, et il n’y a pas de tracto-pelle pour filer un coup de main ; et les palettes de parpaings, ne croyez pas qu’elles arrivent directement sur le site en camion, bien empilées : tout est transporté pierre par pierre sur 500 mètres par les élèves. En une journée. Hébé.
Depuis deux semaines, donc, lorsque dans les classes on regarde à travers les orifices faisant office de fenêtre, on voit défiler, en permanence, des élèves portant chacun quelques parpaings sur la tête — pour les apporter sur le site. J’ignore s’il font cela sur leur heure de sport, ou si le proviseur en appelle au service à la collectivité pour faire faire cela dans les trous de l’emploi du temps…
À l’heure où j’écris, les fondations sont creusées et les murs s’élèvent jusqu’à environ la moitié de leur hauteur finale (qui sera probablement d’un seul étage). Ici, on manque peut-être parfois d’argent pour les finitions, mais quand on a décidé de construire, on construit vite.
Notes:
1: Copyright Boulet
Tags: bibliothèque, préjugés