Il y a quelques jours, après la tombée de la nuit, la maison était exceptionnellement calme. Nous n’en profitions pas pour dormir car nous étions invités pour plus tard au Robinet (« le seul bar qui bouge, à Kpalimé » – comprendre : là où la musique est aussi forte qu’ailleurs, mais où il y a un petit enclos pour danser, et beaucoup de yovos). Rendus perplexes par l’absence d’excès dans le réglage de la télévision, qui diffusait un match de foot à un niveau sonore tout à fait acceptable, par l’absence des grognements de Clémentine ou des cris des enfants, nous sommes partis explorer les lieux. Personne devant la télévision – ce qui n’explique que partiellement le niveau sonore acceptable : on eût pu la laisser hurler toute seule. Lumière éteintes. Personne dans la maison. Les parents étaient sortis. Etonnés, nous faisons le tour. C’est dans un petit renfoncement garni d’une chaise et d’une table, à l’extérieur, que nous trouvons la grand-mère, ce qui est habituel, et deux enfants très calmes qui l’écoutent. Elle leur disait des contes. Pour ceux qui ont suivi, la « grand-mère », c’est à dire en fait l’arrière-grand mère des enfants, ne parle pas français, ce qui n’ôtait rien à la beauté de la scène, mais beaucoup à mes capacités de compréhension.
Depuis quelques temps, lors des ateliers de lecture avec les élèves (de dix à vingt ans), j’utilise des contes. J’insiste sur ce à quoi leur donne accès la lecture, et en particulier les contes de leurs peuples, et de leurs voisins (j’ai beaucoup de contes peuls et plutôt des élèves éwés, voire kabyiés ou kotokolis). Je leur demande toujours combien d’entre eux ont entendu des contes de leurs grands-parents ou des vieux autour d’eux. Sur un groupe, il y en a parfois un, et il m’est arrivé d’en trouver deux qui en avaient entendus, petits, quand ils passaient des vacances au village. Autant vous dire que c’est rare, et qu’ils ont bien des choses à découvrir en apprenant à lire ceux qui ont été ou sont encore mis par écrit de nos jours.
Caca et Daniel écoutant la grand-mère le soir, ça vous redonne de l’espoir. (Surtout par rapport à Caca et Daniel s’endormant autour de leur grand-père et de la télévision diffusant du football !)
C’est un peu comme cette soirée d’hier, samedi, si différente de ce à quoi nous ont habitués nos fréquentations d’ASTOVOT, et que Pierre promet de raconter dans un prochain article…
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