* Balade en forêt tropicale
Posted on décembre 2nd, 2008 by Pierre. Filed under Non classé.
Maintenant que nous savons que les photos passent (les jours de connexion faste), nous pouvons illustrer nos chroniques – grande classe ! Voici donc le premier reportage photo de ce blog, consacré à notre balade botanique de samedi.
Je ne sais pas si nous l’avons déjà mentionné, mais notre maison est sise route de Missahohé, parfois orthographié « Missaoé », voire « Missawe » ; ce nom nous est donc plutôt familier. Mais nous n’en savions guère plus : est-ce une région, un village ?… Or justement Thomas, notre guide de l’ADETOP, nous a emmené samedi dernier dans la forêt de Missahohé, dont nous avons pu découvrir la réalité derrière le nom.
L’ADETOP, c’est l’Association Découverte du Togo Profond, dont nous avions repéré la pancarte sur la route entre notre maison et le centre-ville. Après avoir également retrouvé cette association dans un de nos guides, nous avions fini, désireux d’excursions, par aller jeter un œil. On nous accueille très cordialement ; nous nous faisons expliquer un peu les objectifs de l’association et les diverses excursions proposées. Au cours de cette discussion, leur capital-sympathie grimpe plutôt haut : ils font du tourisme solidaire, organisent des excursions à la demande sans nombre minimal de participants (un peu à la manière de CASA), parlent très bien français, ce qui est presque rare ici… Nous nous décidons pour une excursion botanique dans les environs, remplaçant nos vagues projets de week-end à Atakpamé.
Le samedi, donc, nous retrouvons Thomas, notre guide, à 8 heures 30 précises — il a pris soin de nous préciser qu’il ne s’agissait pas d’horaires africains avec une demi-heure de marge, et s’amuse de nos deux minutes de retard. Nous partons en moto sur la route de Missahohé, passons devant chez nous, continuons la route ; au bout de quelques kilomètres, nous nous arrêtons au village d’Agome-Yoh, jusqu’où j’étais déjà allé avec Eli et Léo, deux volontaires togolais. Nous traversons le village et croisons beaucoup de monde : c’est un jour de funérailles, et le son lointain des tam-tams, des chants et des salves de canon rythmera toute la promenade.
En sortant du village, la piste s’enfonce dans la forêt tropicale. Petite séquence historique : lorsque les allemands arrivent dans la région au début du XIXème siècle, ils décident d’établir une base arrière sur les hauteurs, afin de pouvoir surveiller les routes commerciales qui se croisent à Kpalimé. Le gouverneur allemand nomme alors ces hauteurs en l’honneur de sa femme hongroise, Missa : Missahohé signifie « colline de Missa ». Ils élèvent des constructions à flanc de colline, au dessus d’Agome-Yoh, et font tracer une piste raide à travers la forêt, sur laquelle nous nous trouvons en ce moment même. Cette piste, sujette à de trop fréquents éboulements et glissements de terrains, sera plus tard abandonnée au profit d’une route goudronnée plus sinueuse mais plus douce, qui relie Yoh à Tomegbé.
Balade botanique, donc : nous allons beaucoup parler d’arbres et de plantes. Au cours de notre cheminement, note guide nous montre le papayer, le manguier, l’igname, le mil, le mimosa sensitif, le cacaoyer, l’arbre à pain, la noix de cola, le bananier, le tek, le caféier, le palmier, la liane de poivre, l’arbuste à ananas, et mille autres variétés. À chaque fois, Thomas nous explique les différents usages de la plante, qu’ils soient culinaires ou médicinaux, ainsi que, le cas échéant, les différentes variétés existantes et comment les reconnaître.
Par exemple, le bananier se trouve en deux espèces, et peut produire la banane douce, dont on a l’habitude en France, ou la banane plantin, plus grosse, moins sucrée, mais dont on fait d’excellentes frites. Le régime est mûr lorsque la fleur qui le prolonge tombe — et accessoirement, la fleur du bananier doux est plutôt resserrée sur elle-même, alors que celle du bananier plantin est très écartée. À votre avis, quelle espèce avons-nous photographiée ?
Nous avons aussi pu trouver des cabosses de cacao mûres, qui contiennent plusieurs fèves enveloppées dans une gangue sucrée, douceâtre, où subsiste néanmoins une légère acidité. Les fèves elle-mêmes sont violettes et très amères, et on peine vraiment à y reconnaître le moindre arôme de cacao torréfié.
Si vous êtres désireux d’en savoir plus, Elise a réalisé une planche récapitulative comportant plusieurs dessins et informations récapitulant ce que nous n’avons pas pu dire ou photographier. Si vous êtres intéressé par le pigment du tek, l’émulation du Smecta par le manguier ou les trompeuses différentes variétés du poivre, cliquez sur l’image ci-dessous !
Après environ deux heures de marches, en sortant d’un taillis broussailleux où le chemin, quoique tracé, se ne laissait plus arpenter qu’en écartant la végétation au bâton, nous tombons nez à nez avec plusieurs bas rectangles de ciment, ainsi que ce qui ressemble un peu à un petit monument aux morts : le cimetière allemand. Apparemment pillé de son marbre lors les troubles anti-gouvernementaux de 1990, il reste étonnamment bien entretenu pour un coin perdu au beau cœur de la forêt. Des plaques de pierre ou de marbre, pour certaines refaites récemment, racontent en allemand (et parfois en gothique) des bribes de l’histoire d’une colonisation difficile, et de contremaîtres trentenaires nés à Stuttgart et reposant à jamais sur les hauteurs de Missahohé. Le coin est calme et ombragé : nous en profitons pour faire une pause, et discuter un peu avec Thomas.
Quelques centaines de mètres au dessus du cimetière se trouvent les bâtiments de Missahohé même. « D’anciennes bâtisses », nous dit Thomas, signifiant par là que ces constructions datent de la période allemande, donc d’il y a un siècle au moins. Je suis ébahi devant l’état de conservation de ces bâtiments, qui semblent avoir été abandonné il y a une dizaine d’années tout au plus. L’enduit s’écaille par endroit, mais sinon c’est quasiment comme neuf — jusqu’aux planchers d’acajou. L’ADETOP a des projets d’en faire un petit centre historique franco-allemand ; ça a l’air de bien intéresser le gouvernement allemand, mais apparemment l’administration togolaise fait traîner les choses…
Nous déjeunons dans la maison du gouverneur, qui a effectivement une vue excellente sur Kpalimé et tout l’arrière-pays — on comprend mieux pourquoi les allemands ont tant tenu à s’installer là. Je comptais vous mettre une photo du panorama, mais Elise préfère la photo d’arbuste à ananas réalisée peu avant – donc voici l’arbuste à ananas.
Nous repartons, et, après dix minutes de bonne piste, rejoignons la route goudronnée, celle qui a été réalisée à la place de l’ancienne piste raide, et que nous avons emprunté en allant à Tomegbé. Nous descendons donc tranquillement la route jusqu’à Yoh, au milieu d’arbres superbes et gigantesques, mais sans parvenir à observer les singes ou les calaos que nous espérions.
Tags: excursions
3 Responses to “Balade en forêt tropicale”
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décembre 2nd, 2008 at 9:02
Je trouve pour ma part que les fèves de cacao ont presque un goût de chocolat 99% quand on les croque…
décembre 2nd, 2008 at 9:47
Tu veux dire que le chocolat 99% à un goût de fève de cacao pur, non ?
Vous avez photographié un régime de banane plantin ?
Merci pour les photos, elles sont superbes…
décembre 3rd, 2008 at 17:14
Cher Mufle,
Je compare avec ce que vous connaissez, pour me mettre à la portée des pauvres mortels qui n’ont jamais goûté aux fèves de cacao.
D’autre part, les photos sont de moi. Merci à toi, donc.
Internet a de nouveau fonctionné cet après-midi, et j’ai relevé ton mail. Je t’enverrai ma réponse à la prochaine fenêtre de connection.
Elsa scripsit.